Il est parfois légitime de demander au tenant du pouvoir de le céder à un autre, surtout quand ce dernier a montré son incapacité notoire à diriger, à faire montre de bonne gouvernance ou si son mandat a pris fin dans les limites imposées par la loi suprême, (la constitution). Mais sous nos tropiques je me demande si cela a toujours été le cas. Franchement et sans faux fuyants, posons-nous et reposons-nous la question. Aujourd’hui dans mon pays des voix se lèvent pour demander le départ du Président de la République. Quand vous leur demander pourquoi, sans vous donner un seul petit argument de valeur, ils vous diront qu’il a fini ses deux mandats. Parfois ils reviendront avec d’autres chansons qui n’ont pas du fait du bien à notre pays. Autrement dit, on lui demande de quitter pour quitter. On se moque de son bilan. On n’en a que faire. De ma petite tribune j’observe tous ces faiseurs de rois qui n’attaquent pas le Monsieur sur son bilan « inattaquable ». Il faut qu’il libère le tabouret, un point, un trait. Tabouret ? Parlons-en. A-t-on vraiment compris le sens du tabouret ? Assurément non.
Le premier Président dont tout le monde s’accorde à reconnaître la grande sagesse, n’a pas fait les choses au hasard. Chez lui tout avait une place. Il a symbolisé le pouvoir par un tabouret. Et le tabouret chez nous dans nos traditions n’est pas occupé par n’importe qui. Du nord au sud, de l’est à l’ouest en passant par le centre, le tabouret est destiné au chef. C’est pourquoi lors de son installation officielle, on le fait asseoir sur un tabouret. C’est dans cette vision que le père fondateur de la Côte d’Ivoire moderne a symbolisé la gouvernance. Il a matérialisé la Présidence, lieu de travail du Président de la république, endroit où il exerce ses prérogatives par le tabouret royal. Regardez bien l’architecture de la Présidence au Plateau, regardez bien. De ma petite tribune, je vois un tabouret royal. C’est ce tabouret qu’ont occupé tous les présidents qui se sont succédé à la tête de notre pays. Partant, toutes les autres responsabilités, qu’on soit chef de campement, de village, de quartier, de canton, président d’institution, ministre, députés, maire et que sais-je encore, à l’instar du chef de l’Etat, sont aussi assis sur des tabourets en miniature. En tout cas telle est ma vision du tabouret. Le fauteuil ne symbolise pas le pouvoir chez nous. Celui qui libère le tabouret pour un fauteuil a donc fait le lit de sa propre chute. Celui-là n’a rien compris au commandement ou à la chefferie.
Le roi chez nous n’est pas assis dans un fauteuil mais sur un tabouret. Ce tabouret diffère de par sa forme, d’une tribu à une autre, mais il garde le même sens. Le sens de la chefferie. Franchement ce pan de notre tradition devait être su de ceux qui aspirent à diriger notre pays. L’ignorer pour moi doit être considéré comme un sacrilège. Cela voudrait aussi traduire qu’on n’est pas mur pour le commandement. Autrement dit qu’on est encore puéril. Autre chose. Où est le mal qu’une personne plus âgée apelle une autre moins âgée « jeune homme » ? Q’un père appelle son fils jeune homme ou « blakoro » ? N’est-ce pas même de la Lapalissade ? Le « Blakoro » désigne chez nous l’enfant. Quand ton père te dit « blakoro » tu ne cours pas lui répondre par des propos injurieux. Le renier est encore plus grave, parce que jamais on aura un autre père. Si un vous accepte, il sera votre père adoptif, pas votre père. C’est une question de l’original et de la photocopie comme on dit chez nous. Emprunter cette voie, c’est également des puérilités. Franchement. Si le père ne répond pas, comprends bien. Ce n’est pas de la faiblesse. Lui ne peut pas te renier, parce que quoi que tu fasses, tu demeures son fils. Chez les Akan, on dit qu’un chef, après avoir craché, ne peut pas revenir laper son crachat. L’enfant égaré qui revient à la maison est un enfant prodige. Mille fois parti après des figues, mille fois il sera reçu par le père à son retour. Si le fils refuse définitivement de ne pas revenir, alors c’est lui qui est damné. Et demain ne soyez pas surpris que la monnaie de votre damnation vous soit rendue par votre enfant à vous.
Tabouret ou fauteuil, pas du tout la même signification.
« Wo pou kpindou », du Tagbana en Français, « A demain ».
JPH