Côte d’Ivoire/La fête de Pâques « tuée » par la mevente de l’anacarde à Niakara

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Même si elles n’ont pas pour véritable tradition de fêter avec éclat la résurrection du Christ à l’instar du peuple Baoulé, cette année c’est dans la morosité absolue que les populations Tagbana du département de Niakara l’ont célébrée. Raison essentielle, pas d’argent parce que la noix de cajou, principale source de revenus pour elles n’a pas été achetée comme souhaité. Les prix pratiqués ont même poussé déjà certains paysans à abandonner leurs plantations dans les broussailles. Avec un prix moyen de 700 frs le kilogramme en 2017, les plus chanceux ont pu vendre leur première production à 200 ou 250 frs cette année. Et au moment nous rédigions cet article, le kilogramme se marchandait entre 75 frs  et 100 frs. Ce sont donc des populations, la tête ailleurs, qui n’ont pas célébré comme d’ordinaire la fête de Pâques. Voici quelques unes de leurs complaintes.


« C’est la plus mauvaise fête de Pâques de ces trois derniers années que nous vivons. Est-ce qu’il faut revenir sur la raison ? Qu’à cela ne tienne. La raison principale c’est la mevente de notre produit phare, l’anacarde. C’est la catastrophe pour nous cette année. Vous voyez que rien ne bouge. On ne peut pas fêter parce qu’on n’a pas d’argent. Je crois que le pouvoir nous a oubliés. Su non il n’allait pas nous laisser aux mains des acheteurs véreux qui pratiquent les prix qu’ils leur plaisent à eux ».


« Il ne nous reste plus qu’a tourner le dos vers les mines d’or. Le coton, il y a longtemps que nous l’avons abandonné pour l’anacarde. Maintenant que lui aussi ne s’ahète plus, aucune alternative ne s’offre à nous à part les mines d’or. Pour moi c’est la volonté déguisée des dirigeants. On ne peut pas donner un prix bord champ et ne pas se donner les moyens de le faire respecter. De quelle force disposons nous, nous autres pour le faire. Aucune autorité ne parle dans l’affaire. Eux tous ont la bouche pleine en ce moment sauf nous ».


« Mon inquiétude c’est pour la rentrée des classes 2019-2020. Je me demande comment nous allons faire ? C’est une année zéro pour nous. Malgré les mauvais pris proposés, il n’y a pas d’acheteurs. A ce rythme les champs vont rester en brousse. Il faut les entretenir avec de l’argent et nous n’en avons pas. En tout cas cette année, il n’est pas question pour moi de traiter ces champs ». 


« Je me demande moi à quoi ça sert, un prix bord champ. On gagnerait à nous laisser comme ça. Au moins nous ne nous ferons pas d’illusions. Cette mauvaise campagne s’est déroulée devant l’administration. Aucun sous préfet ni préfet n’a levé son petit doigt pour défendre les producteurs. A chaque fois qu’ils essayaient de faire quelque chose c’était pour demander aux paysans de ne pas manifester contre cette dituation. Autrement dit, il fallait qu’on les laisse manger tranquillement. Nous allons tous prendre nos bagages et aller vers les mines d’or. Il n’y a pas d’usines dans la région. Que faut-il faire »


Au final il faut vite tirer les leçons de cette désastreuse campagne de l’anacarde 2019. Tous les acteurs y sont invités : autorités, cadres, producteurs, acheteurs, organisations agricoles et même l’État pour ne pas assister à la mort de la filière anacarde. En attendant que cela se fasse, les nouvelles mines d’or que l’on découvre de plus en plus dans la région absorbent de nombreux bras valides parmi les agriculteurs et vont sûrement engloutir un nombre incalculable d’élèves et étudiants avec les vacances qui pointent à l’horizon. Et le grand risque est de les voir définitivement tourner le dos aux salles de classes et autres amphithéâtres.


JPH

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