Côte-d’Ivoire/Édito de Venance Konan: Ce PDCI-RDA là…

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La jeune génération ne sait peut-être pas, ou a oublié comment a commencé la crise qui a trouvé son épilogue en une sanglante guerre entre nous Ivoiriens en 2011.

Il y a quelques jours était prise la décision de limoger le nommé Jean-Marc Bédié de ses fonctions au sein du Parti démocratique de Côte d’Ivoire-Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA). Son tort était d’avoir initié ou participé à une action en vue de parvenir à une réconciliation entre le président du PDCI-RDA et le Chef de l’État, président du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP) et préserver ainsi la paix dans notre pays.

Quel est donc ce PDCI-RDA qui exclut quiconque veut réunir ce qui est épars et travailler à la paix ? Avant Jean-Marc Bédié, c’était M. Lénissongui, fidèle parmi les fidèles, directeur de cabinet du président du PDCI-RDA pendant de longues années, qui était limogé et proprement insulté parce qu’il ne s’était pas éloigné de certains de ses amis membres du RHDP.
Avant lui, ce sont des hommes et des femmes qui avaient consacré toute leur vie au PDCI-RDA, qui lui avaient consenti d’énormes sacrifices qui en étaient exclus parce qu’ils avaient voulu que leur parti demeure dans la coalition du RHDP.

Rappelons que le RHDP avait été créé par le président du PDCI avec le président Ouattara et d’autres chefs de partis, pour permettre à la Côte d’Ivoire de retrouver la paix et le chemin du développement, et que de nombreux combats avaient été menés par cette coalition qui dirigeait le pays.

Que n’avait-on pas fait pour que tout le monde au PDCI-RDA s’inscrive dans ce RHDP que de nombreux militants avaient du mal à appréhender. Et voici que brusquement, sans que l’on comprenne vraiment ce qui s’est passé, le mot d’ordre est désormais de haïr tout ce qui se réclame du RHDP et tout ce qui de près ou de loin se rapporte au chef de l’Etat. Et quiconque refuse de s’inscrire dans cette voie est humilié et banni du parti. Ainsi le Vice-président de la République et par ailleurs vice-président du PDCI-RDA fut-il hué en présence du président du parti lors d’une réunion du bureau politique de ce parti sans que M. Bédié ne bronche pour mettre au pas ceux qui s’étaient livrés à une telle forfaiture.

Désormais à chaque réunion, quiconque émet un son discordant, qui ose réfléchir avec son propre cerveau est hué, humilié, menacé dans son intégrité physique. Quel est donc ce PDCI-RDA de l’intolérance, de la haine, de l’exclusion, de la méchanceté ? Ce n’est pas le parti que le Président Houphouët-Boigny avait laissé comme héritage aux Ivoiriens que l’on voit là. Et ils sont de plus en plus nombreux, les militants de ce parti qui ne s’y reconnaissent plus et qui se demandent si un groupuscule quelque part n’est pas en train d’abuser du grand âge de quelqu’un. Faut-il rappeler que c’est dans le grand nord, ce nord qui à l’époque allait jusqu’à Ouagadougou, que Félix Houphouët-Boigny obtint les voix qui l’envoyèrent siéger au Palais Bourbon en France ?

Faut-il rappeler que toute sa politique fut basée sur l’alliance stratégique entre le nord et le sud de notre pays, et qu’aussitôt après sa disparition, son parti perdit le nord au sens propre comme au figuré ? Les militants de ce parti se rendent-ils compte que d’exclusion en exclusion, le PDCI-RDA se réduit comme peau de chagrin et risque de se limiter à la seule région de son président ? Faut-il être aveugle et amnésique pour ne pas comprendre que l’on court de nouveau vers la catastrophe pour ce pays si l’on reprend les mêmes palabres qu’il y a vingt ans ?

La jeune génération ne sait peut-être pas, ou a oublié comment a commencé la crise qui a trouvé son épilogue en une sanglante guerre entre nous Ivoiriens en 2011. Peut-être parce que la paix est revenue très vite, et que la croissance fulgurante de notre économie a rapidement effacé les effets de la guerre, elle nous semble aujourd’hui très lointaine. Mais leurs aînés, surtout ceux qui ont été des acteurs directs de cette crise n’ont pas le droit de poser à nouveau les actes qui nous y avaient plongés il y a vingt ans. Nous devons tous nous y opposer.

Nous ne pouvons donc que saluer l’initiative d’un groupe de cadres et militants du PDCI-RDA qui ont interpellé leur parti afin qu’il s’inscrive véritablement dans la ligne de son fondateur. Le PDCI-RDA est avant tout le parti du dialogue. Comment peut-il s’y refuser avec celui qui fut son partenaire et avec qui il a gouverné le pays durant ces longues dernières années ? Et comment peut-il blâmer ceux de ses militants qui le prônent ? Le PDCI est le parti de la paix.

Tout le monde voit que la fragile paix que nous avons pu obtenir après toutes ces années de braise est menacée. Il est heureux de constater qu’il existe encore des personnes de haut niveau au sein du PDCI-RDA pour le percevoir et vouloir conjurer la fatalité dans laquelle l’on veut nous enfermer. Mais comme la paix et le dialogue se font au moins à deux, il est aussi urgent qu’une main en face saisisse rapidement la main tendue du PDCI. Pour ne pas donner raison aux extrémistes de ce parti qui auront beau jeu de dire : « vous voyez bien que ce sont eux qui ne veulent pas de l’apaisement… »

Venance Konan

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