Côte d’Ivoire/Si la poterie mangoro de Katiola m’était contée

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La poterie traditionnelle « mangoro » joue une place de choix  dans le patrimoine culturel et artistique de la Côte d’Ivoire. Et donc dans l’économie  ivoirienne. Elle est tout  une histoire de famille et de renouvèlement du pacte avec les ancêtres.

L’argile, la matière de base, la matière essentielle

L’argile est la raison de vivre de ces populations. Avant, seules les femmes étaient habilitées à descendre dans les puits pour extraire l’argile. Et cela ne se faisait pas tous les jours.

Le Lundi et mardi, il était interdit aux populations de se rendre dans les fosses pour chercher l’argile. Le site d’extraction était également un haut lieu d’adoration des ancêtres. Les potières affirment ou croient que ce sont les morts qui leur fournissent l’argile de qualité nécessaire à la leurs travaux. Il s’agit pour l’essentiel de la fabrication de pots de fleurs, de soupières pour les repas, de boîtes à bijoux, de canari, de jarres etc…

Origine des Mangoros

Les « Mangoros » vivent au centre-nord de la Côte d’Ivoire, dans la région de la vallée du Bandama, essentiellement dans la ville de Katiola (Nord du pays) et dans ses périphéries. Le peuple est reconnu pour sa particularité à travailler l’argile.

Comment est travaillée l’argile

Première spécificité des« potières de Katiola » venue du nord du pays, l’argile est pilée sur une peau de bœuf. « On ne peut pas utiliser un mortier pour cet exercice. Il faut mettre suffisamment d’argile pour fabriquer 20 à 40 pots par semaine », révèle une potière.

Résultat

Le résultat de cette étape est aussitôt visible. L’artiste obtient son premier jet de pâte qui va servir à donner une forme aux pots. Deuxième curiosité présenté par les potières, c’est la « Tour traditionnelle » utilisée pour ajuster les formes des articles. Pour de nombreux artisans-potiers, c’est pendant cette étape que la matière devient vivante. Cette tour traditionnelle s’appuit sur un vieux plafond, un morceau de pagne, de l’eau. « Notre tour traditionnelle est différente de celle des poteries modernes qui elles ont des tours électriques. Une potière ne peut pas utiliser une tour qui n’est pas sortie de son atelier », indique une autre potière. Cet outils en forme d’aubergine, est un caillou qu’on retrouve uniquement au bord de la mer. En pays Mangoro, ce caillou très lisse porte le nom de « Gpô ». L’objet est surtout utilisé pour bien polir le pot avant d’apposer le dessin. Les roues de véhicule aident la potière à donner des croquis uniques aux articles. Et ce n’est pas tout, Dame Coulibaly utilise un instrument que seul les potières de sa région possèdent. Il s’agit du « Woya », un petit couteau qui sert à donner la forme finale au pot fabriqué par l’artisan. Il faut ensuite, pour la potière, réaliser un trou au centre de l’Objet, remettre le pot au soleil, passer par l’application de la terre rouge pour renforcer les éclats de l’article. Et retour au « Gpô » pour refermer tous les petits trous encore présents sur le pot. Enfin, étape ultime et fatale, la cuisson ou les objets, recouverts de paille, sont disposés dans un grand feu. … ce qui fait peur aux potières. « Cette étape est cruciale et dangereuse pour nous les potières. Si le pot n’est pas bien cuit, il reste noir. Mais quand, c’est bien cuit, ça devient tout rouge. On n’a même l’impression que c’est du feu qui est à l’intérieur du canari. Lorsque la potière sort le pot du feu et qu’elle constate qu’il est toujours noir, c’est qu’un malheur va survenir dans sa famille. C’est un signe de nos ancêtres », affirme sur un ton grave la potière. Pour conserver cette étiquette de mysticisme, elle présente un liquide rougeâtre qui sert de peinture. Cette mixture à base d’écorce est utilisée pour le traitement de maux de ventre.

Aujourd’hui les potières de Katiola renouent avec leur clientèle composée majoritairement de touristes. « Les Mangoros ont souffert pendant la crise. Nous n’avions plus de touristes. Certes, la paix est revenue, mais les touristes n’ont pas encore eu le courage d’aller vers nous. Nous demandons donc au gouvernement de nous aider à relancer notre commerce », dira l’une d’elle dont le souhait est partagé par le grand ensemble.

JPH

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