Enquête/BOUAKE, Daoukro, Niakara. Comment les populations vivent les mesures de lutte contre le Coronavirus

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De folles rumeurs ont annoncé il y a quelques jours, deux cas de personne atteinte du Covid-19 dans la capitale du centre. Information heureusement démentie la direction régionale de la santé. A ce jour donc il n’existe pas de malade de coronavirus à Bouaké. Malgré cette nouvelle rassurante, les populations sont invitées à suivre les mesures préventives de lutte contre cette pandémie prises par le Conseil national de santé dirigé par le chef de l’Etat Alassane Ouattara lui-même. Ces mesures, il faut le dire tout net, ne sont pas appliquées comme il le faut dans certains endroits. Ce qui fait planer un réel danger sur tout le monde. Dans la plupart des quartiers, lieux de travail, gares routières, magasins, marchés et commerces, on continue de vivre comme si de rien n’était. Aucun dispositif de lavage de mains. On continue de se saluer en se serrant les mains et même en se donnant des accolades. Véritable inconscience ou insouciance.

Quelle explication donnée à ce comportement ?

« J’entends parler de cette maladie, mais la vie appartient à Dieu. Je ne sais pas s’il y a des mesures que le gouvernement nous demande suivre. On a fermé les écoles, c’est ce que je sais ». Voici le témoignage de Moussa K du quartier Houphouët ville qui montre bien que les mesures de lutte contre cette pandémie, annoncées récemment par le gouvernement, ont du mal à être appliquées à la lettre, car beaucoup de personnes minimisent le danger qui rode. Tenez dans ce maquis restaurant en plein centre du quartier des affaires, où la moindre mesure préventive ne semble être prise, (dispositif de lavage des mains au savon), la gérante nous confie : « Les gens continuent de venir manger comme par le passé ici. Il Y en a qui demandent même de la viande de brousse. Quand nous leur expliquons c’est interdit à cause du coronavirus, ils vous répondent qu’ils ne savaient pas. « Pour moi, les mesures ne sont pas suffisamment diffusées ou bien c’est une mauvaise foi des uns et des autres  », se presse-t-elle d’ajouter. Nous lui faisons la remarque qu’elle ne dispose pas de dispositif de lavage des mains et que la distance entre les personnes demandée n’est pas respectée. « Nous allons le faire bientôt », se contente-t-elle de nous dire. « Même au temps de la maladie d’Ebola, nous avons continué de commercialiser la viande de brousse, malgré l’interdiction, ce n’est pas le Coronavirus, qui va nous empêcher de le faire. C’est notre gagne-pain quotidien », expliquera Dame K Nicole, restauratrice au quartier Broukro de Bouaké. La situation est grave. La viande de brousse, pourtant interdite est toujours prisée et la plus demandée dans les restaurants. De Daoukro  à Niakara en passant par Bouaké, le constat est le même. Le problème est pratiquement l’affaire des seuls services de la santé qui sont au four et au moulin, pour prévenir toute éventualité. A Daoukro par exemple, après avoir reçu la feuille de route de leur tutelle, tous les agents du district sanitaire sont disposés à contrecarrer tous cas suspects dans la localité. Le directeur départemental de la santé, Manoua Marc, a tenu à rassurer les populations, que tout est mis en oeuvre, pour répondre à leurs besoins. Il a indiqué que des renforcements de capacité ont eu lieu dans ce sens, avec tous les agents de santé et que des réunions de sensibilisation sectorielles sont prévues ces jours-ci. « Nous allons faire passer le message du gouvernement dans tous les différents services et secteurs d’activités qui fonctionnent dans la ville. Surtout, nous allons veiller à ce que les règles d’hygiènes et les mesures prises par le gouvernement soient respectées. Il ne faut pas que les populations soient affolées. Il faut qu’elles nous saisissent ou viennent à l’hôpital, après constat d’un malaise ou d’un quelconque signe. Même dans les villages, elles peuvent prendre contact avec les infirmiers, qui ont les rudiments pour cela. Ce n’est pas forcément parce qu’on a la toux ou la fièvre que l’on a contracté la maladie. Il faut que les populations aient la culture d’aller à l’hôpital » a-t-il déclaré. Surtout, il a indiqué qu’à l’hôpital général, une salle de confinement avec 3 lits est prête pour recevoir les cas suspects. Et d’ajouter que d’autres salles en dehors de l’hôpital général seront prévues pour accueillir d’éventuels malades. Le directeur départemental de la santé a souligné que sous l’égide du préfet de région, préfet du département de Daoukro, également présidente du comité de suivi de la lutte contre cette pandémie dans le département, ses collaborateurs et lui iront vers les populations pour leur expliquer les mesures de prévention, car si ces règles sont suivies à la lettre, Daoukro ne connaîtra pas de cas de contamination. Et depuis le vendredi 20 mars les rencontres avec les populations de tous les secteurs d’activités ont démarré. Lueur d’espoir à Bouaké où les mesures sont respectées chez les opérateurs de téléphonie mobile, (lavage des mains systématique et distance réglementaire entre les clients). A Niakara, dès les premières heures, les autorités administratives ont réactivé le comité de veille mis en place du temps du virus Ebola. Mais ici, il faut aller plus loin avec la fermeture immédiate de tous les sites d’orpaillage artisanaux, lieux de proximité par excellence 

Quelques services de l’Etat respectent strictement les consignes.

A la Drenet-Fp de Daoukro, (Direction régionale de l’éducation nationale et de la formation professionnelle), qui a le plus grand nombre de personnel, et malgré la suspension des cours dans les établissements scolaires, un lavage de main est imposé à l’entrée de la structure. A l’absence de la première responsable, le secrétaire général 1, Mehou Kouakou, dira que malgré qu’il y ait une quarantaine d’agents en service dans l’enceinte, tous respectent la distance d’au moins un mètre d’écart entre chacun d’eux. Et le lavage des mains est obligatoire à l’entrée comme à la sortie du service. Sans omettre de ne pas se serrer la main. Pour mieux maîtriser ces mesures, Mehou Kouakou annoncera que des permanences sont assurées, pour réduire le personnel, afin d’éviter un regroupement d’agents dans les bureaux. Même son de cloche à la direction régionale de la protection sociale, au conseil régional des droits de l’homme, que nous avons visitée. Bref, dans tous les services de l’Etat y compris la préfecture, tout se déroule selon les dispositions prises par le gouvernement. Au-delà du satisfecit dans les structures étatiques, il faut noter le respect des consignes par les religieux. Comme exemple, malgré l’appel du muezzin de la mosquée du quartier Chicago, pour la prière du soir, du jeudi dernier, les portes sont restées closes. A l’église catholique on observe une suspension des messes.

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Gares routières, marchés, supermarchés, magasins, maquis on continue les mêmes habitudes dans l’indifférence totale.

Dans ces lieux, c’est comme si de rien n’était. La vie se déroule comme auparavant. Au marché de Niakara par exemple, Dame Koné Pétah, vendeuse d’ignames, signifiera qu’aucune mesure n’a été prise par rapport au fonctionnement des marchés, donc les commerçantes ont la latitude de se comporter comme auparavant. Et c’est en vendant leurs articles, qu’elles peuvent avoir des entrées d’argent pour survivre. Quant à une application de mesure élémentaire d’hygiène comme le lavage des mains, elle nous interroge pour savoir qui leur fournira ce matériel? Ambiance identique à la grande gare routière de Bouaké. Ici, l’on est préoccupé à faire des surcharges pour gagner plus d’argent que de s’intéresser à des mesures de prévention contre une quelconque maladie. Un chef de gare sous le couvert de l’anonymat, recommande une sensibilisation accrue, car selon lui, beaucoup de transporteurs n’ont aucune information sur la maladie. Néanmoins, il soutient que le nettoyage des véhicules est exigé au moins. Dans toutes les boutiques, magasins et surtout supermarchés, aucun dispositif d’hygiène n’est visible. Les clients y entrent et y sortent sans avoir recours au lavage des mains et surtout, ils se frottent comme s’il n’y avait pas de danger à le faire. C’est également le cas pour les maquis et restaurants, qui ne sont pas sous le coup de la fermeture.

Que faire donc ?

Passer à la phase de répression paraît être une solution à envisager le plus rapidement possible. Le couvre-feu, la fermeture systématique de tous ces maquis, restaurants et bars qui ne respectent pas au minimum les mesures édictées par le Conseil national de santé pouvoir contraindre les récalcitrants. Aussi une sensibilisation accentuée s’impose avec notamment les moyens de communication traditionnels, les griots et autres crieurs dans nos villages, campements et hameaux, car nos parents dans ces zones rurales, ne sont pas informés de l’existence du Coronavirus. Il faut donc accentuer la sensibilisation. Beaucoup de personnes se basent sur des fausses informations, des rumeurs ou des suppositions, pour ne pas respecter les mesures prises par l’État. Certains font croire que le virus ne résiste pas à la chaleur, d’autres insinuent qu’il suffît de boire des boissons fortes ou frelatées, pour l’éviter quand d’autres préconisent faire des lavement de ventre avec du piment ou même consommer des sauces bien pimentées. Pis, l’on fait croire que la maladie ne peut tuer des africains noirs. E somme toutes sortes de préjugés qui réconfortent ceux qui ne veulent pas changer.

L’heure est plus que grave et demain peut être trop tard.

JPH

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