France/Le premier sous-marin nucléaire Barracuda arrive

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C’est un sous-marin nucléaire d’attaque de nouvelle génération est en fin de construction chez Naval Group, à Cherbourg. Il a fallu plus de dix ans pour mener à bien ce chantier d’une complexité sans précédent.

Avec la mise en route progressive des installations du Suffren, le sous-marin nucléaire d’attaque de nouvelle génération, c’est un énorme chantier qui entre en phase finale. Le Suffren doit être livré à la Marine nationale en 2020. Il sera le premier d’une série de six Barracuda qui viendront remplacer les submersibles actuels, entrés en service dans les années 1980.

La flotte française compte en effet quatre sous-marins lanceurs d’engins (SNLE, qui emportent les missiles nucléaires) et six sous-marins d’attaque (SNA). Ces derniers accomplissent des missions de surveillance et de renseignement. C’est cette partie de la flotte qui va laisser la place à des Barracuda plus gros et plus modernes.

L’ensemble du programme a coûté plus de neuf milliards d’euros. La construction du Suffren a démarré il y a plus de dix ans, un délai normal pour ce genre de navires complexes. À l’approche de la fin du chantier, Naval Group a ouvert les portes à quelques journalistes, de façon exceptionnelle, sur son site de Cherbourg.

Un gros cigare noir sur ses « marcheurs »
Le Suffren se trouve actuellement dans un grand hall industriel, l’atelier Laubeuf. Il ressemble à un gros cigare noir sous perfusion de câbles et encore entouré d’échafaudages. Mais il est déjà posé sur des « marcheurs », ces jambes de métal qui permettent de le déplacer. En juillet prochain, ils devraient aller jusqu’à l’eau, soit 100 mètres à parcourir. Le chemin prendra un peu plus de quatre heures.

Là, dans un bassin du chantier, le sous-marin prendra son premier bain. Il subira des tests d’étanchéité. Puis le combustible nucléaire sera chargé et il partira pour ses premiers essais à la mer. Pour l’instant, le Suffren subit une longue phase d’essai à terre. « On vérifie que chaque équipement tourne, qu’il n’y a pas de fuite, que tout est branché dans le bon sens », explique Hervé Glandais, responsable du chantier. « La semaine dernière, nous sommes même allés jusqu’à faire du pain à bord », pour s’assurer que tout fonctionne et en silence pour rester indétectable.

99 mètres de long
Un sous-marin doit en effet être discret, résister à la pression des grands fonds et être autonome : produire son énergie, son air, son eau, disposer de capacités d’écoute et d’armes. Tout cela dans un espace réduit. L’intérieur est un enchevêtrement de pompes, de valves, de robinets. Le Barracuda fait 99 mètres de long pour un diamètre de 8,80 m. À bord se trouvent plus de 20 km de tuyaux et 160 km de câbles. « La fabrication est un gros puzzle, plus compliqué que de faire l’Étoile noire en Lego », plaisante Alain Morvan, le directeur du site de Cherbourg. Ce travail occupe 2000 salariés.

Dormir à côté des torpilles, c’est fini…
Le Suffren est très attendu par la Marine nationale. « Il est en phase avec les outils numériques modernes et il a une meilleure habitabilité », constate le capitaine de vaisseau Bertrand Dumoulin, ancien commandant de sous-marin qui veille à l’avancée du chantier. Il compte 26 000 heures de plongée. « Quand j’ai commencé à naviguer, j’ai dormi à côté des torpilles », se souvient-il. À bord du Suffren, les 63 marins disposeront tous d’une couchette individuelle et les écrans tactiles sont partout.

Un symbole résume cette révolution : on ne verra plus le commandant mettre sa casquette à l’envers pour coller ses yeux au périscope : il n’y en a plus. À la place se trouve un « mat optronique », qui porte une caméra. Le commandant aura un fauteuil, comme dans les navires de surface, et verra les images sur des écrans.

Deux fois plus gros que les sous-marins d’attaque actuels, le Barracuda fonctionnera avec moins de marins : 63 contre 70 pour les anciens SNA. Il pourra tenir plus longtemps à la mer, jusqu’à 45 jours. Et autre nouveauté, il accueillera des femmes dans les équipages. Pour l’instant, la promiscuité ne le permet pas sur les SNA.

Le contrat du siècle avec l’Australie
Ce Barracuda est le premier à être achevé. Mais il a déjà convaincu l’Australie qui en a acquis douze au prix de 34 milliards d’euros à livrer à partir de 2027. C’est le plus gros contrat militaire jamais signé par la France. Seule différence : les sous-marins australiens ne seront pas à propulsion nucléaire, mais diesel.

« De plus en plus de pays s’équipent en sous-marins, surtout en Asie », relève Alain Morvan. « Et avec les États-Unis et la Russie, la France est un des seuls pays au monde à pouvoir produire l’ensemble des éléments d’un sous-marin nucléaire, ce qui assure notre souveraineté. » Les Barracuda français devraient rester en service au sein de la Marine nationale jusqu’aux environs de 2060.

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Les missions d’un sous-marin d’attaque

Le Barracuda fait 5 300 tonnes en plongée. Il mesure 99 m de long et peut descendre à plus de 350 m de profondeur. Après le Suffren, premier à être livré à la Marine nationale, viendront le Duguay-Trouin, le Tourville, le De Grasse, le Rubis et le Casabianca.

Un SNA assure la sécurité du porte-avions Charles-de-Gaulle et conduit des missions de renseignement. Les Barracuda pourront en plus déployer des forces spéciales sans faire surface et frapper la terre avec précision à plus de 1 000 km, au moyen de missiles

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