Russie/Wagner en rébellion ?

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Après avoir accusé l’armée régulière russe d’avoir mené des frappes sur des camps de combattants de Wagner à l’arrière du front ukrainien, Evguéni Prigojine, le chef du groupe paramilitaire Wagner, qui déclare être au QG de l’armée à Rostov, a appelé au soulèvement contre le commandement militaire russe et a affirmé être entré avec ses hommes sur le territoire russe. Les services de sécurité accusent le chef de Wagner d’appeler à la guerre civile et Moscou a été placée sous le « régime d’opération antiterroriste ».

Le chef du groupe paramilitaire Wagner multiplie les messages audio sur sa chaîne Telegram officielle. Evguéni Prigojine a notamment affirmé être entré en Russie avec 25 000 combattants et jure d’« aller jusqu’au bout » et de « détruire tout ce qui sera mis » sur sa route afin de « libérer le peuple russe ». Il a affirmé être « entré dans Rostov », ville du sud de la Russie, non loin de l’Ukraine. « Les sites militaires de Rostov sont sous contrôle, y compris l’aérodrome », a précisé Evguéni Prigojine dans une vidéo, alors que derrière lui marchent des hommes en uniforme. De son côté, l’armée russe promet de « garantir la sécurité » des combattants de Wagner s’ils arrêtent leur rébellion.

Trahison

Vers 23 heures, le FSB annonce l’ouverture d’une enquête criminelle contre Prigojine pour «appel à l’insurrection armée». Une heure plus tard, le général Sourovikine, considéré comme le meilleur allié de Wagner au sein de ministère de la Défense, puis un autre haut gradé russe, publient des vidéos dans lesquelles ils s’adressent aux combattants de Prigojine. «Je vous appelle à vous arrêter. […] Avant qu’il ne soit trop tard, vous devez obéir aux ordres du président élu de la Fédération de Russie». Cela ressemble à un lâchage en règle. «Prigojine n’a aucun allié au sein du pouvoir. Il avait des gens qui l’aidaient sur ordre de Poutine, des connaissances, mais en aucun cas des alliés. Tout le monde va le condamner.» A la télévision d’Etat, une série d’émissions spéciales reprennent mot pour mot les communiqués de presse du ministère de la défense, accusant Prigojine de trahison et niant avoir mené la fameuse attaque de missiles qui aurait mis le feu aux poudres. Poutine reste muet. Son porte-parole affirme qu’il est informé de la situation en temps réel. Des fuites anonymes dans la presse, sur les réseaux sociaux, parlent d’une panique absolue régnant au Kremlin, sans qu’il soit possible de vérifier ces informations. La police et la garde nationale sont mises en état d’alerte à Rostov. Des blindés sont aperçus dans les rues de la ville. Quelques-uns aussi à Moscou devant les bâtiments officiels. Les autoroutes menant de Rostov à Moscou sont bloquées.

Imperturbable, Prigojine continue, tout au long de la nuit, de publier des nouveaux messages audio. Il affirme que ses hommes ont passé la frontière russo-ukrainienne, ont fraternisé avec les garde-frontières, que les troupes envoyées pour les arrêter ont refusé de combattre, des pilotes d’avions et d’hélicoptères ont refusé de les bombarder. Et peu à peu, des vidéos commencent à émerger. On y voit, dans l’aube naissante, des coups de feu échangés aux entrées de Rostov. Puis des hommes en armes et des chars d’assaut un peu partout dans la ville, dont il est impossible de déterminer à quel camp ils appartiennent. La confusion, toujours.

Jusqu’à cette nouvelle vidéo, publiée peu de temps après sept heures du matin par le compte Telegram Grey Zone, associé à Wagner. On y voit Evgueni Prigojine entouré de mercenaires en armes, dans la cour de l’état-major de la région militaire de Rostov. Manifestement, ses hommes contrôlent le bâtiment. Il discute avec deux officiers russes. L’un n’est autre que le vice-ministre de la défense, Younous-Bek Evkourov. «Nous sommes venus ici. Nous voulons le chef d’état-major, et Choïgou. Tant qu’ils ne sont pas ici, nous restons, nous bloquons Rostov et nous marchons vers Moscou». Au ton qu’il emploie pour faire la leçon aux deux hommes, il semble maître de lui et de la situation. Quelques minutes plus tard, nouvelle vidéo : Prigojine, face caméra, affirme que ses forces contrôlent «les sites militaires de Rostov», y compris l’aéroport. Il insiste sur le fait que les opérations militaires contre l’Ukraine se poursuivent normalement. Et lance de nouvelles accusations contre le ministère de la défense : «Les pertes territoriales sont colossales. Les pertes en hommes sont trois à quatre fois supérieures à ce qui est rapporté à Moscou. Il y a parfois jusqu’à mille pertes par jour. Le chef d’état-major s’est enfui dès qu’il a su que nous approchions du bâtiment».

Que peut-il se passer ensuite ? Les forces de Wagner sont-elles réellement en marche vers la capitale russe ? Et pour y faire quoi ? Il n’y a pas, à l’heure actuelle, de réponse à ces questions. L’ambiance, sur les réseaux sociaux russes, rappelle celle des premiers jours de l’invasion de l’Ukraine, en février dernier : sidération et vertige alors que défilent sur les fils d’actualité des informations qui semblaient encore, la veille, relever de la mauvaise politique-fiction. Tout, d’un seul coup, est devenu possible.

Sources RFI et Liberation

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