Etienne Kouya, président du groupement des imprimeurs de Côte d’Ivoire (ICI) au terme du séminaire de Grand-Bassam
Etienne Kouya, président du groupement des imprimeurs de Côte d’Ivoire (ICI) et les membres du groupement ont échangé sur les grands projets de la corporation et initié des programmes pour la jeunesse. Nous l’avons rencontré entre deux séances.
Quels sont les grands enseignements qu’on tire de la rencontre que vous avez eue récemment à Bassam ?
Ce fut une très belle journée de réflexion sur notre corporation. Depuis la création de ce groupement, il y une forte mobilisation. C’est une jeune corporation qui n’est pas encore connue. Nous nous battons pour qu’elle soit connue. L’imprimerie est un secteur pourvoyeur d’emploi mais un peu méconnue par la jeunesse ivoirienne. L’idée est de former les jeunes de Côte d’Ivoire au métier de l’imprimerie. L’imprimerie n’est pas seulement tirer les papiers offset. C’est un ensemble de métier. Il y a la sérigraphie qui s’occupe de tout ce qui est impression sur les supports de tissu, t-shirt, la calligraphie, sur les murs, l’imprimerie numérique qui s’est ajoutée sur les pages numériques, il y a le offset, c’est-à-dire les impressions sur les bâches et affiches publicitaires et sur les supports d’information. Il y a donc plusieurs domaines que regroupe le métier d’imprimerie.
A Bassam, vous avez décidé de faire un geste à l’endroit de la jeunesse…
Effectivement. Nous offrons 10 milles prises en charge aux jeunes de Côte d’Ivoire à travers le ministère de l’Emploi et de la promotion des jeunes, le ministère de la Formation professionnelle, les mairies, les conseils régionaux et toutes les structures en charge de la formation des jeunes en Côte d’Ivoire. Nous estimons que c’est notre part à jouer dans la réduction du chômage en Côte d’Ivoire mais surtout dans le freinage de l’immigration clandestine des jeunes. Le problème en Côte d’Ivoire, c’est que quand vous n’êtes pas une organisation politique, vous avez du mal à véhiculer nos idées et les moyens même qui suivent, font défaut. Nous n’en voulons pas aux organisations politiques mais il suffit qu’elles aient une idée pour que le lendemain, les fonds soient mis à leur disposition. Mais nous demandons les moyens, cela va mettre du temps. C’est ce qui fait qu’aujourd’hui, les jeunes n’arrivent pas à voir le bout du tunnel. C’est notre préoccupation. Comment véhiculer nos idées ? Comment les pouvoirs publics et les organisations internationales peuvent prendre en compte les idées que nous voulons véhiculer ? Nous avons des investissements qui existent, on ne demande que la présence des jeunes pour les exploiter. Il y a de la place. Une imprimerie peut employer entre vingt et trente cinq personnes. Seulement on ne peut pas les former et les payer en même temps, ça devient lourd pour nous. Nous avons un pays béni de Dieu, il suffit que les hommes politiques nous écoutent.
Comment expliquez-vous concrètement la prise en charge ?
C’est d’offrir la possibilité à tout jeune de Côte ayant une vision dans l’imprimerie de s’insérer. C’est comme toute prise en charge que les mairies offrent aux parents d’élèves lors de la rentrée scolaire ou universitaire. Le bénéficiaire pourra s’acquitter d’une toute petite somme devant permettre à l’imprimeur qui le reçoit d’amortir certaines charges. La formation se faisant au sein de l’imprimerie. Les 10 milles stagiaires ne pourront pas être des chefs d’entreprise comme par exemple ceux qui ont le niveau CM2 pourtant ils ont besoin d’être insérés. Si on les forme et qu’on voit qu’ils ont la capacité d’être recrutés, ils ont déjà leur place dans l’entreprise. Maintenant pour ceux qui ont un niveau plus élevé, nous pouvons leur créer une imprimerie clé en main avec la collaboration des étudiants sortis des écoles de management et de finances comptabilité parce que l’imprimeur qui vient d’être installé ne peut lui seul faire le travail. Par exemple quelqu’un qui a reçu une formation de machiniste avec un niveau CM2, ne peut pas diriger une entreprise. Même s’il s’y essaye, il ne peut pas être en train de tirer, de faire le prix et en même temps aller chercher d’autres marchés ou aller livrer. Ce sera très difficile. A côté de l’imprimerie, on peut mettre de la sérigraphie pour l’impression des t-shirt. Cela a besoin aussi de jeunes pour l’aider. Il y a également le service numérique. Une entreprise a besoin d’enseigne et ce sont les services numériques qui le font maintenant. Si on a des imprimeries à San Pedro, Soubré, Issia, vous allez voir que le politicien qui veut faire des t-shirts n’aura pas besoin de venir à Abidjan. Le chantier est vaste.
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans votre travail ?
Les difficultés, on les rencontre dans tout corps de métier. C’est ce qu’on appelle dans le jargon religieux, les épreuves. C’est après une épreuve qu’il peut avoir une gloire. L’imprimerie n’est pas en reste. La première difficulté peut être le fonds de roulement. Un imprimeur a constamment besoin de fonds de roulement. Et ce ne sont pas les marchés qui le donnent. C’est tout juste un pourcentage sur les bénéfices. Et quand tu le prends pour le faire tourner, ça devient difficile surtout quand ça coïncide avec la fin du mois. Le fonds de roulement doit provenir le plus souvent des banques. Mais en Côte d’Ivoire, il faut le reconnaître, c’est un sérieux problème. Les conditions que les banques posent en Côte d’Ivoire sont souvent hors de portée des imprimeurs. Souvent même on peut passer une journée entière à la banque. Il y a aussi l’approvisionnement en matière première. La plupart de nos matières premières proviennent de l’extérieur. Au moment où on a besoin de ces matières premières, il peut avoir une rupture de stocks au niveau des fournisseurs. Un autre problème qui n’est pas souvent de notre faute, c’est que les clients attendent toujours les derniers jours pour arriver. L’imprimerie, c’est une procédure. Donc, elle a besoin du temps. Nous sommes dans l’attente des élections. Mais vous allez voir que c’est au dernier moment que tous les candidats viendront. Quand ils arrivent à la fois comme cela, nous avons d’énormes difficultés. Il y a des choses qu’on ne peut pas maîtriser telles que les embouteillages. Quand vous avez une commande et que vous tombez dans les embouteillages, vous avez toutes les difficultés.
A Bassam, vous avez parlé aussi de partenariat avec des groupements de presse, de banquiers etc. De quoi s’agit-il concrètement ?
Aujourd’hui, aucune structure ne peut s’auto-suffire. Nous allons signer un partenariat avec l’Association des chefs d’entreprise de presse numérique de Côte d’Ivoire (Acepnuci), le Groupement des éditeurs de Côte d’Ivoire (Gepci), l’Union nationale des journalistes de Côte d’Ivoire (Unjci), l’Union des radios de proximité (Urpci) et avec les fournisseurs de matières premières. Cette politique vise à démontrer à la face des assurances et des banques que nous sommes aussi organisés. Nous avons besoin de beaucoup communiquer. A travers la presse, nous pensons que nous pouvons atteindre notre cible.
Certains préfèrent aller tirer des magazines en Tunisie et au Maroc. Est-ce que les imprimeurs ivoiriens n’ont pas cette capacité ?
Nous en avons la capacité. Et c’est justement pour cela aussi que nous avons créé notre mouvement. Il va arriver un moment où nous allons poser le problème à l’Etat de Côte d’Ivoire. Il est inconcevable que nous payions les impôts, nous avons des charges comme l’électricité, l’eau, la Cnps et que les gens se lèvent pour aller imprimer ce qu’ils veulent imprimer ailleurs. Qu’on pense aussi au groupement des imprimeurs de Côte d’Ivoire en lui versant un pourcentage. Ce serait une politique salutaire. C’est en Côte d’Ivoire qu’on voit ce genre de chose. On n’a jamais vu qu’en France, pendant les élections, ce sont des imprimeurs allemands qui impriment les bulletins de vote, les t-shirts des candidats, les affiches et autres gadgets.
Ces gens parlent souvent de qualité et de prix…
Pourquoi c’est seulement lors des élections qu’on se rend compte qu’il n’y a pas la qualité chez les imprimeurs de Côte d’Ivoire ? Alors que pendant les pré-campagnes, on sollicite les imprimeurs de Côte d’Ivoire. Nous sommes outillés. Le problème est ailleurs.
En tant que président, qu’attendez-vous des imprimeurs de Côte d’Ivoire ?
Les imprimeurs de Côte d’Ivoire ne se faisaient pas confiance et chacun menait ses activités de son côté comme bon lui semblait. Heureusement qu’avec la naissance du groupement des imprimeurs de Côte d’Ivoire, tous les imprimeurs ont commencé par comprendre la politique. Beaucoup ont compris comme vous l’avez constaté à Bassam. Et nous attendons d’eux la cohésion parce que beaucoup d’imprimeurs se plaignent. D’un quartier à un autre, d’une imprimerie à une autre, les prix ne sont pas les mêmes. Cela est décrié. Nous essayons de faire en sorte que les prix pratiqué soient les mêmes partout. Cela passe par la régulation de l’approvisionnement des matières premières en imprimerie.