Libre opinion/De la liberté d’aller et de venir

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Si je ne m’abuse, la liberté d’aller et de venir est l’une des libertés d’agir protégée par le droit. Alors si j’ai raison depuis ma petite tribune, il faut laisser celui ou ceux qui veulent partir ou venir, le faire librement. Il ne faut pas se soucier de ce que les peuples burkinabé, malien et nigérien gagnent à quitter la Cédéao. De même, il vaut mieux ne pas se demander ce qu’ils perdent ou croient perdre en y demeurant. Ils veulent partir, c’est leur droit. Quand ils voudront revenir aussi, c’est leur droit, mais en ce moment ce droit sera assujetti à celui des autres États membres de dire oui ou non. L’organisation sous régionale gagnerait à regarder dans sa propre maison. À force d’appliquer ses propres textes à géométrie variable, elle a fini par perdre la confiance des peuples, d’autant que nombre de dirigeants d’États membres accusent un déficit de crédibilité, sinon de légitimité. La lucidité ne commande-t-elle pas de bâtir, sur des bases saines et rigoureuses, une nouvelle organisation, avec des critères d’adhésion plus contraignants que la seule appartenance à cette aire géographique, avec des valeurs réellement partagées ? De ma petite tribune, j’insiste pour dire qu’il n’est pas du tout impérieux de vouloir retenir, malgré eux, ces trois pays, unis dans une alliance qui a le mérite d’une certaine cohérence. Ils partagent les mêmes frontières, ont pour eux la même végétation (le Sahel) et souffrent du même mal, le djihadisme. Chaque peuple choisit librement avec quel autre il veut marcher. Aux citoyens de ces trois États d’apprécier si les dirigeants, qui font le choix de les couper de la Cédéao, jouissent de la légitimité nécessaire pour engager de la sorte le destin de leur nation. On a beau crier que cette sortie est brutale et radicale, moi je ne suis pas de cet avis. Elle se dessinait en filigrane depuis que les putschistes qui dirigent ces États jouent au chat et à la souris avec l’opinion internationale dans son ensemble, pas seulement la CEDEAO en refusant de déterminer un calendrier clair de la fin de leur transition. N’est-ce pas qu’ils se comportent comme des présidents démocratiquement élus. Et quand ils ont commencé leur ballet pour la mise sur pied de leur manchin, l’AES la voie était toute tracée de leur sortie. Faut-il aujourd’hui s’interroger sur la fiabilité de leurs motivations ? Assurément non. Tous ont un précédent avec la Cédéao, qui ne les reconnaît pas comme des dirigeants légitimes. En plus,  l’imposition des sanctions est venue en rajouter. Au demeurant, je me pose quelques questions qui me paraissent fondamentales. Des dirigeants théoriquement de transition devraient-ils s’arroger de telles prérogatives ? Des dirigeants régulièrement élus ne seraient-ils pas mieux fondés que des putschistes, même acclamés, pour engager ainsi l’avenir de leurs peuples ? Les putschistes ont-ils pensé aux tracasseries qui pourraient se dresser sur la route des 6 millions  de Burkinabè, Maliens et Nigériens vivant en Côte d’Ivoire seulement ? Qui saura dire aux populations quel avantage présente pour elles cette rupture ? Malgré les discours de souveraineté de leurs actuels dirigeants, les droits de douane et autres surcoûts pour leurs importations arrivant par les ports ivoiriens, ghanéens, béninois, nigérians, et même togolais n’auront-ils pas, d’une façon quelconque, une répercussion sur chacune de leur famille ? Alors, moi de ma petite tribune, je comprends que cette rupture ne profite à aucune partie, ni CEDEAO, ni AES. Du côté des peuples des trois pays, ils seront sûrement les grands perdants de cette rupture, tout comme leur diaspora sous-régionale. Quelques opérateurs économiques des pays voisins visés pourraient y laisser un peu de leurs marges, le temps de se réorganiser. Pour sa part, la Cédéao, elle, devrait se retrouver diminuée avec cette sortie, du quart de ses seize États membres, à l’origine, avec la Mauritanie, partie en l’an 2000. Voilà des pays qui chantent le panafricanisme à longueur de journée et qui paradoxalement, par leurs actes, tournent le dos à la vision de l’un des précurseurs de cette doctrine, le Dr Kwame Nkrumah qui, en 1963, demandait aux Africains de se mettre ensemble. C’est finalement face à des choix d’une telle gravité que Cheikh Hamidou Kane, dans L’aventure ambiguë, se demandait en substance, si ce que l’on gagne à quitter une union vaut mieux que ce l’on perd en y demeurant. Nos trois mousquetaires y ont-ils seulement pensé ? De ma toute modeste tribune, je les salue et prie le bon Dieu qu’il fasse d’eux des leaders éclairés mus uniquement par l’intérêt supérieurs de leurs concitoyens. Le reste n’est que du tintamarre de vuvuzelas et le temps qui est le second nom de Dieu, tranchera inéluctablement un jour. En attendant bon vent à l’AES.

JPH 

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