Rentrée scolaire/Dans la galère des parents d’élèves de Bouaké

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On peut vraiment le dire ainsi. La vie n’est pas du tout rose pour les parents d’élèves en cette période de rentrée scolaire marquée par une augmentation généralisée de toutes les denrées. Alors que les parents d’élèves étaient déjà sous le poids d’une hausse de nombreux produits alimentaires, riz, lait, sucre, huile…le carburant à son tour est venu « ajouter pour lui » comme on dit chez nous. Une augmentation que le gouvernement explique par la situation mondiale (la guerre en Ukraine et l’augmentation des cours du pétrole). La faute n’incombe pas au gouvernement qui a dû faire de nombreux efforts pour maintenir les prix à leur niveau précédent pendant une bonne période. La faute est loin aussi d’être le fait du citoyen lambda, du parent d’élève de Péguékaha, de N’têkelefê, Doufrèbo ou de Tiessan, lui dont les enfants ne demandent qu’à aller à l’école. Lui, il n’a qu’un seul protecteur. C’est le gouvernement qu’il connaît. Et il se demande bien si celui-ci ne lui a pas tourné le dos.

Ce matin du mardi 3 octobre 2023, je rencontre le parent d’élève K.M. Désiré, agent de la poste à la retraite, aux abords d’un collège de Bouaké. L’homme est physiquement affaibli par une hypertension, comme il nous le confie lui-même. Mais il tient vaille que vaille à effectuer de ses propres mains, l’inscription physique de l’un de ses enfants en classe de troisième. Entre amertume et colère, il crie son stress causé par les énormes dépenses scolaires auxquelles il doit faire face.

Pour M. Désiré, la gratuité de l’école est un leurre. « L’école n’est pas gratuite. Quand vous finissez l’inscription en ligne, 6000 frs pour le secondaire public, le plus dur commence maintenant pour vous. Les manuels scolaires changent d’année en année. Pour mes deux enfants qui sont en classe de troisième mais dans des établissements différents, je dois leur acheter des livres de collections différentes. Les livres utilisés par leur ainé l’année passé, sont devenus caduques. A chaque rentrée, c’est la même chanson, les livres changent et leurs prix grimpent. Que dire des cahiers ! Le cahier de 300 pages par exemple qui coûtait moins de 500 frs il y a deux ans, coûte aujourd’hui mille francs voir, plus. Tout nous est imposé. Où se trouve la gratuité dans tout ça ? Je ne sais plus où mettre la tête à l’heure où je vous parle. Il paraît que ce phénomène de collection de livre est arrivé au primaire avec des livres qui diffèrent d’une école à une autre. On a l’impression qu’à la tête de ce ministère, ce sont les têtes qui changent et non les habitudes », lance M. K.M. Désiré qui avait visiblement plus à dire.

Je mets le cap sur un magasin de fournitures scolaires. Traoré Gnénéma, un chariot en main, se faufile parmi les rayons du magasin pour acheter des fournitures scolaires pour ses quatre enfants. Pour cette mère, la rentrée scolaire est une véritable chimère. « À la rentrée scolaire, nous, les parents, sommes vraiment stressés. Entre les frais de scolarité, les uniformes et les fournitures, il est difficile de s’en sortir », malgré que dans son cas, elle se prépare un mois à l’avance pour ne pas être prise de court. Mais, Mme Gnénéma ne pourra pas payer la totalité des fournitures de ses enfants cette année faute d’argent. « Je vais acheter une partie aujourd’hui. Le reste, ce sera après », dit-elle.

Face à toutes ces difficultés, des parents d’élèves optent pour des solutions intermédiaires, les librairies de trottoir ou librairies par terre. Ici, les avis sont partagés. Quand certains les trouvent moins chères que les librairies modernes, pour d’autres il n’y a pas de différence. « Les livres vendus à 5 000 FCFA en librairies conventionnelles se trouvent ici à 2000 FCFA. C’est ici que je fais ma rentrée chaque année », témoigne Olga Kouamé. Elle est tout de suite prise de court par Koné François. « Moi je préfère les librairies modernes parce qu’elles vendent les livres effectivement au programme et ils sont neuf. Il vaut mieux acheter un nouveau livre à 5000 frs qu’un ancien livre à 4000 frs ».

Par manque de moyens financiers, une autre frange de parents font recours aux prêts ou à la location de manuels scolaires. C’est le cas de Kouakou, N’takpé Louis. « Il y a dans mon quartier à Broukro, une petite organisation d’élèves et étudiants qui proposent des manuels en location. Cela fait deux ans que je me tourne vers eux et ça marche bien entre nous. A la fin de l’année, quand vous ramenez les livres en bon état, il n’y a pas de soucis », affirme-t-il.

Toutefois, si le mois de septembre se présente pour de nombreux parents d’élèves comme un moment d’extrême anxiété, il offre une vraie opportunité d’affaires pour d’autres. Et cette année encore, ce mois n’a pas dérogé à la règle. De nombreux commerçants d’articles scolaires se frottent bien les mains.

Salimata Zongo vendait des vêtements traditionnels. À l’approche de la rentrée scolaire, elle a flairé une opportunité de changer d’activité en vendant des uniformes scolaires. C’est comme ça pour elle chaque rentrée et elle avoue s’en tirer à bon compte « De la vente de vêtements traditionnels, Je passe à celui des uniformes scolaires pendant la rentrée des classes où la demande est forte. J’avoue que ça marche pour moi », témoigne-t-elle.

Au total, la flambée des prix de plusieurs produits de grande consommation, accentuée par la récente hausse du prix du carburant à la pompe, complique davantage la rentrée scolaire 2023-2024 pour les parents d’élèves qu’on retrouvent bien souvent entre lamentations, soupirs et colère aux abords des écoles, dans les magasins de vente de fournitures scolaires et même dans les rues.

JPH

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