CPI/Fatou Bensouda fait son bilan

0
789

Elle aura passé près de 9 ans à la tête de la Cour Pénale International (CPI). Celle que les Ivoiriens n’oublieront pas de si tôt, a un bilan marqué par les débats sur l’impartialité de la Cour, les affaires Jean Pierre Bemba et Laurent Gbagbo. Que retenir d’elle ?

Fatou Bom Bensouda est une avocate gambienne, procureure générale de la Cour pénale internationale (CPI) depuis 2012, après en avoir été pendant huit ans la procureure-adjointe. Elle naît à Banjul au sein d’une famille musulmane polygame. Son père a six enfants de l’une de ses épouses (la mère de Fatou) et sept enfants de sa seconde épouse. Son père est fonctionnaire, sa mère travaille dans le service de restauration scolaire d’un lycée.

Fatou Bensouda est très jeune intéressée par la défense des droits des personnes, notamment des femmes et assiste à des procès. Après une scolarité secondaire brillante, elle devient quelque temps greffière au tribunal de Banjul. Grâce à une bourse de l’État gambien, elle entreprend des études de droit au Nigéria, d’abord de 1982 à 1986 à l’université d’Ife, aujourd’hui nommée Université Obafemi-awolowo. Puis à la Nigerian Law School de Lagos, où, en 1987, elle obtient un diplôme de droit, dit barrister at law.

Après trois années d’activité professionnelle, en 1990 elle s’inscrit à l’International Maritime Law Institute basé à Malte, une agence des Nations Unies qui lui décerne son diplôme de droit maritime en 1991. Après être sortie du gouvernement gambien, Fatou Bensouda obtient d’autres diplômes, notamment en novembre 2001 un diplôme en bénévolat au sein du Comité international olympique à New York, ainsi qu’un diplôme d’études en langue française (DELF) 1er degré délivré par le ministère de la Jeunesse, de l’Éducation Nationale et de la Recherche de la République française.

En 1967, elle est admise au barreau en Gambie. La même année, elle est nommée conseillère auprès du gouvernement de Gambie de Dawda Jawara. En février 1994, elle obtient un poste de procureur.

UN BILAN MI FIGUE MI RAISIN

« Personne n’échappera à la justice » : voilà ce que promettait Fatou Bensouda dans une interview en 2018. Après 18 ans de carrière au bureau du procureur la Cour pénale internationale, dont elle est elle-même procureure générale depuis juin 2012, la Gambienne arrive au terme de son mandat le 15 juin prochain.

Durant son mandat, Fatou Bensouda a beaucoup enquêté en Afrique : en Centrafrique, au Mali, en Guinée, au Soudan, en Libye notamment.

D’où l’argument d’un « acharnement contre les Africains », brandi par la Gambie de Yahya Jammeh, dont Fatou Bensouda est une ancienne ministre, pour se retirer de la Cour pénale internationale, comme le Burundi ou l’Afrique du Sud, en 2016 et 2017.

’Je suis à la fin de mon mandat, un procureur est élu pour un mandat de neuf ans, j’ai été élue en 2012 et, dans quelques jours, ce sera fini. Je pense que j’ai fait un bilan assez positif au regard de tout le travail accompli. Il y a eu vraiment des succès, des défis et des challenges’’.

Bensouda assure avoir élever le niveau de la CPI.

‘’Je pense que le niveau où j’ai trouvé la CPI est aujourd’hui beaucoup plus élevé et je remercie tout le monde, les Etats-parties, l’Afrique et surtout le Sénégal pour le soutien pendant mon mandat’’, a-t-elle souligné au cours d’une conférence de presse.

‘’Dans les défis, le plus dur est relatif aux témoins parce que nous avons la responsabilité de sécuriser les témoins. On a vu dans l’exemple du Kenya que des témoins ont été retrouvés et détournés contre la Cour, ce qui a entrainé l’abandon de ce dossier en faveur du président Uhuru Kenyatta accusé de crimes contre l’humanité après l’élection présidentielle de 2007 qui avait fait 1300 morts’’, a -t-elle regretté.

‘’Tout est fait dans la négociation, car on n’a pas de pouvoir d’oppression. On négocie toujours avec le pays pour les mandats. Si on ouvre une enquête, on va voir avec qui travailler dans le pays concerné. (…) parfois on n’a point besoin d’assistance, on vient mener nos enquêtes normalement. Le travail est très difficile’’, a-t-elle reconnu.

La magistrate gambienne dit avoir été guidée par ‘’la transparence’’ durant tout son mandat qui prend fin le 14 juin prochain.

Au sujet du dossier relatif à la crise ivoirienne, la procureure sortante de la CPI a déclaré ne pas avoir de regret, après l’acquittement de Laurent Gbagbo et de Blé Goudé son co-détenu à la CPI.

‘’Je ne faisais que mon travail en tant que procureure dans l’affaire Laurent Gbagbo et Blé Goudé. Il n’y avait rien de personnel. Il s’agissait de mon travail, un sacerdoce à remplir. On a eu beaucoup de difficultés à présenter les preuves et quand on a terminé, les juges les ont jugés insuffisantes’’, fait valoir Mme Bensouda.

Elle estime n’avoir attaqué personne sur cette affaire. ‘’Je faisais mon travail, je suis procureur, si je juge que la loi n’a pas été bien dite, je saisis la chambre la plus élevée sur la base des aspects juridiques’’, a-t-elle dit soulignant qu’elle avait une ‘’responsabilité en tant que la procureure de laisser une jurisprudence ».

Elle a ajouté que les choses ont été très ‘’complexes’’ sur cette affaire car trois juges sur deux n’étaient pas d’accord sur les preuves présentées. ‘’Je respecte leur décision, j’ai fait mon travail, je n’ai rien contre Gbagbo et je n’ai pas de regret’’, a-t-elle insisté.

La magistrate est également revenue sur les sanctions infligées contre sa personne par l’administration de l’ancien président américain Donald Trump.

‘’C’était très dur, on a confisqué mon visa. On avait beaucoup de soucis, mais cela n’a pas empêché de faire mon travail. Aujourd’hui, Dieu merci, la nouvelle administration estime que ces sanctions n’avaient pas de sens », a-t-elle fait observer.

‘’Certains propagent l’information selon laquelle la CPI n’instruit qu’en Afrique, je précise que d’autres pays comme la Colombie, la Palestine, le Venezuela, les Philippines, la Tunisie, l’Afghanistan, Georgi, Ukraine, sont concernés’’, s’est-elle défendue.

Elle a rappelé que la première responsabilité de la résolution des crimes contre l’humanité revenait aux Etats en premier lieu avant l’intervention de la CPI.

L’AFFAIRE LAURENT GBAGBO

Fatou Bensouda connaît l’un de ses échecs les plus cuisants lors du procès de Jean-Pierre Bemba. Non seulement le président du Mouvement de libération du Congo est acquitté en 2018 des « crimes de guerre et crimes contre l’humanité » pour lesquels il était poursuivi, mais l’ancien chef de guerre va jusqu’à réclamer plus de 68 millions d’euros d’indemnisation et dommages et intérêts à la CPI pour ses années passées en prison.

Sa demande est rejetée en 2020 par la CPI qui l’a condamné en 2019 pour subornation de témoins.

Mais l’un de ses plus grands fiascos demeure de ne pas avoir réussi à prouver la culpabilité de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. La CPI les avait inculpés de « meurtres, viols, persécutions et tentatives de meurtres et autres actes inhumains ».

Le dossier, instruit à charge par Fatou Bensouda, est présenté comme l’un des plus importants depuis la création de la cour. Les deux prévenus acquittés, la procureure décide de faire appel.

Ses détracteurs lui reprochent alors de faire le jeu des réseaux d’influence du président Alassane Ouattara, soutenu par les Occidentaux.

Sources APS et WIKIPEDIA

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici