La SOTRA à Bouaké/Quel bilan deux mois après son déploiement dans la capitale du centre

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Le 24 septembre 2021, le Premier Ministre ivoirien, Patrick Achi, à Bouaké affirmait, que les activités de la Société des Transports Abidjanais (SOTRA) dans cette ville vont changer la mobilité et la vie d’un million de personnes. C’était lors du lancement officiel des activités de la SOTRA dans la capitale de la Région du Gbêkê, devant plusieurs membres du Gouvernement et de nombreuses populations. « Les activités de la SOTRA à Bouaké vont contribuer à changer la mobilité et la vie d’un million de personnes. Les autobus permettront d’accompagner le développement équilibré du territoire et satisfaire ainsi les besoins des populations en mobilité urbaine », se réjouissait Patrick Achi. Aujourd’hui, exactement 66 jours après son déploiement (au 30/11/2021), même si l’on peut dire que la SOTRA est réellement installée, force oblige de reconnaître que les populations ne l’ont pas encore véritablement adoptée dans leurs comportements quotidiens. Pourquoi la mayonnaise ne prend pas encore bien ? Mais déjà quels sont les avantages qu’elle offre aux riverains ? Qu’en pensent les populations ?

Une soixantaine d’autocars pour commencer
Pour le démarrage effectif, c’est un réseau de 60 bus que la SOTRA a mis à la disposition des populations de la capitale de Gbêkê. Les 60 autocars sont chargés d’assurer dans un premier temps, la desserte sur quatre lignes. Elles se composent comme suit : Air France/ Tchélékro ; Aéroport/Houphouët-ville ; Ahougnansou/Kennedy et Habitat de la caisse/Olam Kennedy. Mais à moyen terme, la SOTRA portera son parc à 100 autobus pour desservir huit lignes.

Deux jours de gratuité dans les bus de la SOTRA à Bouaké

La SOTRA commença ses activités par 48 heures de transport gratuit des populations afin de leur permettre de découvrir, non seulement les services de ce transport, mais également les différentes lignes que la compagnie va desservir, notamment les lignes 301, 303, 304 et 305. L’objectif est de parvenir à huit lignes avec 100 autobus dans l’optique de transporter à peu près 100 000 passagers par jour. pendant ces deux jours, l’on a vu des autocars bondés de monde. Normal, puisqu’il s’agissait d’une gratuité, et Dieu seul sait que tout le monde en raffole. Passées ces heures de gratuité, on verra pendant plusieurs jours, des bus rouler quasiment vides au point où l’on va se demander si la société ne va pas jeter l’éponge. Mais nous somme vite rassurés par l’un des responsables de la société, « La SOTRA vise l’horizon 2023. Nous sommes conscient que le décollage ne se fera pas d’un coup. Il y a les habitudes qui doivent évoluer de sorte que les populations s’habituent à ce nouveau mode de transport dans leur ville, il y a des lignes à corriger, parce qu’elles ont été créées et n’avaient pas véritablement d’intérêt. Par contre, il y a d’autres lignes à créer parce que dans les quartiers qu’elles desservent, il y a une potentielle clientèle. C’est le cas du quartier Ahougnansou château et Broukro que nous avons vite fait d’inclure. Il y a les cartes de transport qui ont commencé à être vendues et nous avons de l’affluence au niveau des élèves et étudiants… En somme, un certain nombre de réglages pour aller vers notre vitesse de croisière. Nous en sommes conscients. Et à l’horizon 2023, comme le ministre des Transports et le Premier ministre le disaient, le réseau va atteindre environ 400 autobus opérant sur dix lignes ». 

Des avantages déjà perceptibles pour toutes les couches socioprofessionnelles.
Les étudiants et élèves 

La présence de la SOTRA à Bouaké contribue entre autres, à l’amélioration de la mobilité urbaine et à la facilitation du ralliement des centres névralgiques de la ville (les écoles/universités, hôpitaux, marchés, etc). En outre, les populations se déplacent à moindre coût et dans de meilleures conditions de sécurité et de confort. Ce que confirment ces témoignages. « Moi je suis étudiante en deuxième année d’Histoire-Géographie et je vis avec mes parents au quartier Belleville. Pour ceux qui connaissent bien Bouaké, rallier mon quartier d’habitation et le campus, c’est un véritable voyage que je dois effectuer chaque fois que j’ai cours. Si je dois le faire à moto taxi ou en taxi, c’est au moins trois escales. Ce qui me revient à 600 frs l’aller et la même somme au retour, donc 1200 frs par jour, rien que dans le transport. Avec le bus, en attendant d’avoir ma carte de transport, c’est 400 frs, soit 200 frs l’aller et 200 frs le retour par jour. Vraiment le choix est vite fait », nous confie l’étudiante Alice Koffi. L’élève Yao Ulrich Modeste en classe de terminale D au Lycée Moderne Djibo Sounkalo, lui, met l’accent sur le confort et la sécurité que lui offre le bus. « Je loue un studio au quartier Gonfreville avec mon petit frère. Nous étions obligés de nous rendre au Lycée à moto chaque matin. Nous avons dû négocier un contrat avec un conducteur de moto taxi à raison de 15000frs par mois. Il vient nous chercher tous les matins et nous ramène les soirs après les cours. Nous étions soumis aux intempéries en temps de pluie. En suite avec les moto taxis à Bouaké, ce sont de gros risques d’accidents que nous prenions. Aujourd’hui, avec nos deux cartes de bus pour 6000frs, nous nous rendons à l’école dans la sérénité. Chacun de nous, mon petit frère et moi, se donne même le luxe de respecter son emploi du temps. La SOTRA à Bouaké, c’est vraiment un ouf de soulagement. Je demande à tous mes camarades d’opter pour le bus qui nous assure une sécurité plus parfaite et le confort ». Pour sa part, M. Traoré premier responsable du Collectif de élèves et étudiants de Bouaké, CEECI, a salué cette volonté du Président de la République Alassane Ouattara. « En tant que syndicalistes qui luttons au quotidien pour le bien-être des élèves et étudiants, nous ne pouvons qu’être satisfaits et fiers d’accueillir la SOTRA à Bouaké. C’est un événement historique ». Selon lui, l’Université Alassane Ouattara (UAO) de Bouaké avec une capacité d’accueil initiale de 4000 étudiants se retrouve aujourd’hui avec 25 000 inscrits dont 21 000 qui résident hors du campus. Ces derniers, logeant pour la plupart à plusieurs kilomètres de l’UAO, à la périphérie ouest de Bouaké, ils dépensent en moyenne 18 000 francs CFA par mois en terme de transport entre leur maison et l’université ». « Vous conviendrez donc avec moi que cette arrivée effective des autobus de la SOTRA à Bouaké ne peut que nous réjouir, parce qu’avec la carte de bus à 3000 FCFA nous, nous nous déplaçons aisément et en toute sécurité », a fait savoir le secrétaire général du CEECI, rappelant que le problème du transport des élèves et étudiants à Bouaké faisait partie des principales revendications de son syndicat depuis 2015. « En 2018, nous avons rencontré le ministre des transports Amadou Koné pour lui exposer ce problème, aujourd’hui, soit trois ans plus tard, nous avons une réponse positive. C’est donc un ouf de soulagement pour nous », a-t-il ajouté avant de féliciter le président Alassane Ouattara et le ministre Amadou Koné pour avoir réalisé ce vieux rêve de la ville de Bouaké.

Les travailleurs et les autres  

« Hormis les élèves et étudiants, toutes les populations de Bouaké bénéficient des bienfaits de la SOTRA. Son déploiement  à Bouaké participe aussi de manière générale à la relance économique et sociale de cette ville. De manière générale, l’ouverture des nouvelles lignes de la société nationale de transport urbain est accueillie avec beaucoup d’enthousiasme dans la capitale régionale du Gbêkê. Pour Konan Kouassi Pierre, parent d’une élève de 4è au lycée Moderne 2 de Bouaké, « L’année dernière (2020-2021), j’ai dépensé près de 20 000 F CFA par mois en terme de transport pour ma fille, en plus de tous le stress que j’ai dû endurer tout au long de l’année à cause des risques d’insécurité routière auxquels elle était exposée tous les jours. C’est donc un vrai ouf de soulagement pour moi », a confié le père de famille de 6 enfants. Du côté des premiers responsables de la commune de Bouaké, ce ne sont pas des sons discordants qui caressent nos oreilles. le maire Nicolas Djibo, se réjouissait aux premières heures de l’avènement de la SOTRA de cette offre de transport de la SOTRA qui va améliorer les conditions de déplacement de ses administrés. « Les bus de la SOTRA sonnent la fin des longues marches des populations sous le soleil et la pluie. Celles-ci ne seront plus soumises aux tarifs exorbitants qui leur étaient appliqués auparavant. En somme elle va simplifier le quotidien des populations de notre belle cité ».

Des grincements de dents 

La venue de la SOTRA à Bouaké , n’est pas que rose. Quelques avis divergents se font tout de même entendre. Des sceptiques en sont encore à se demander entre autres, comment les autobus de la SOTRA arriveront à circuler convenablement dans ce tohu-bohu de la circulation à Bouaké, où de nombreux motocyclistes et automobilistes sont souvent indexés pour leur manque de civisme sur la voie publique. Et ceux-là n’ont pas tord, car un des machinistes de la ligne de l’Université Alassane Ouattara nous avouait qu’il n’est pas aisé pour eux de travailler à Bouaké. « Nous sommes soumis quotidiennement à l’indiscipline des conducteurs de motos taxis en premier. Suivent les chauffeurs de taxis et quelques véhicules de particuliers qui viennent stationner aux arrêts des bus bien qu’ils soient matérialisés. Peut-être que beaucoup le font par ignorance, mais par moment c’est vraiment harassant. Des chauffeurs de taxis veulent rivaliser avec vous par la vitesse. Nous, nous ne faisons pas de la vitesse », coupe-t-il sous le couvert de l’anonymat. Des grincements de dents se font également entendre du côté des acteurs du transport déjà présents sur le terrain. Mais de façon générale, les chauffeurs de taxi ville donnent l’impression de minimiser l’impact de la SOTRA sur leur recette journalière. « Ecoutez, moi je ne me plains pas de l’arrivée de la SOTRA, car je continue de faire ma recette. Eux, ils arrêtent de circuler à 20 heures déjà. Nous, nous continuons. Et puis, il y a des endroits où le bus ne peut pas rentrer. En tout cas la présence des bus ne me gêne absolument pas », affirme Bamba S, chauffeur de taxi. Ce n’est toutefois pas le cas pour les conducteurs de taxi-motos qui se montrent quelque peu inquiets. « Notre grande clientèle était constituée d’étudiants et élèves. Maintenant avec leurs cartes de bus, il est évident que cela va nous enlever des clients? Par exemple si nous transportions une centaine par jour, il va va falloir réduire ce chiffre au moins de moitié. Mais qu’à cela ne tienne ! Nous allons changer nos habitudes et travailler beaucoup plus quand ils vont arrêter », se console Ouattara Nouhouo, conducteur de moto taxi. 

Du travail pour les riverains, un recrutement lancé

Un mois après que la société a mis pied à Bouaké, elle a lancé un recrutement du nouveau personnel. Le premier magistrat de la ville a fait savoir que pour bien mener ses activités dans sa localité, la Société des transports abidjanais procède à un recrutement selon les qualifications et le nombre de places disponibles. Ce sont au total 372 postes dans divers domaines qui sont à pourvoir, indiquait le communiqué du maire Djibo Nicolas. Il s’agit entre autres de machinistes, de personnel médical, de manœuvres, de mécaniciens, de caissiers, d’assistantes sociales….Djibo Nicolas invitait par ailleurs, « toutes les personnes intéressées à s’adresser à l’Agence emploi jeunes, sise dans les locaux de la mairie de Bouaké (ex-ONUCI, route d’Abidjan) ». Et depuis ce communiqué, les populations, selon une source bien introduite à la mairie de Bouaké, affluent des quatre coins du pays, pour venir postuler. « Depuis l’annonce du recrutement à la SOTRA de Bouaké, les bureaux commis à cet effet ne désemplissent pas. Les postulants viennent de partout. De Facobly, Odiéné, Bouna…mais le gros lot, c’est ici à Bouaké », révèle notre source. Notons que la SOTRA à Bouaké va générer la création de 1 300 emplois directs et de 2 000 emplois indirects. Du 24 septembre 2024, 30 novembre 2021, cela fait exactement deux mois et 06 jours, soit 66 jours que la Société des transports abidjanais a pris ses quartiers dans la capitale du centre. Pour le citoyen lambda qui a vu le départ de cette société, aujourd’hui elle est bien lancée dans ses activités. Des autocars n’ayant même pas un seul client après la période de gratuité, l’on en est à des bus plusieurs bondés de monde. Au départ de certaines lignes, dans le quartier de Tollakouadiokro, ces bus sont remplis au point où ils ne marquent plus d’arrêt jusqu’à leur terminus au corridor sud. Du côté des deux campus, où des dos d’ânes installés pour raison de sécurité, les empêchaient de rouler en toute quiétude et qui ont été ramenés à des proportions acceptables, ils ont également commencé à faire bien de fois le plein de leurs passagers. Et ce témoignage d’un riverain qui disait avoir vu des passagers à la lutte pour emprunter un bus dans le quartier des affaires, (le commerce), finit de vous convaincre que la SOTRA entre de plus en plus dans les habitudes des riverains de Bouaké, chaque jour que Dieu fait. « Je me suis cru un instant en plein Adjamé », disait-il.

JPH

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