Nana Konan Kan, chef du village de Kami dans la commune de Yamoussoukro, explique les raisons de l’absence de plusieurs chefs traditionnels Akouè à la rencontre avec le président Bédié le mercredi 6 mars 2019, dénonce ce qu’il considère comme « le faux usage de faux de Dahouet Boigny Augustin » ; puis propose ses solutions pour réconcilier le président Bédié et Ouattara.
Qu’est ce qui explique votre absence, lors de l’arrivée du président Bédié à Yamoussoukro ?
Nous désapprouvons le déplacement. Comme vous avez pu le constater vous-même, le premier jour, quand le président Bédié est arrivé, il n’y avait aucun chef Nanafouè. Il n’y avait que trois ou quatre chefs Akouè. Les chefs ont décidé de le boycotter. Dans la nuit du mardi 5 au mercredi 6 mars, ils ont fait pression. Ils ont appelé Nana Coba Kouamé, chef des Nanafouè , ils l’ont menacé . Voilà comment Coba Kouamé est allé à la cérémonie. Mais, quand ils ont appelé individuellement les chefs, ceux-ci ont répondu qu’ils ne viennent pas. D’abord, ils ne veulent pas s’associer à ça et leur chef canton n’est pas Augustin Dahouet. Aller s’assoir là-bas, c’est reconnaître implicitement que Dahouet est leur chef. Ils ont dit qu’ils ne veulent pas se prêter à cette mascarade. Sur les 48 chefs, il n’y avait que huit(8) chefs à la rencontre.
Comment ça c’est passé ?
Le service de protocole du président Bédié a appelé le chef de canton des Nanafouè pour lui demander de faire venir ses chefs. Pourquoi, n’a-t-il pas fait avec notre chef canton ? Nous, notre chef de canton, c’est Nana Boigny N’Dri III. Ils ne l’ont pas appelé jusqu’à aujourd’hui. Ça veut dire qu’ils ne le reconnaissent pas comme chef. Or, nous nous le reconnaissons comme notre chef . Dès lors qu’ils n’appellent pas notre chef, on ne va pas où on nous appelle. Est ce que le président Bédié lui-même peut accepter de recevoir des militants du PDCI accompagnés par quelqu’un qui se dit président du PDCI-RDA ? C’est un principe que nous avons décidé entre nous. Si vous voulez nous voir, vous parlez à notre chef canton. Et c’est lui qui nous dit d’aller. Mais, si vous nous appelez individuellement nous ne viendrons pas. Voila la principale raison. Notre chef canton n’a pas été appelé, il n’a pas été prévenu. Sans quoi, par pure politesse il allait venir s’assoir pour écouter le président Bédié.
Malgré tout vous lui avez ouvert les portes du caveau familial des Boigny ?
Vous savez Nana Boigny N’dri III est un homme de paix. À l’époque, souvenez-vous, le président Bédié avait interdit l’accès du caveau au citoyen Ouattara. Mais, nous ne voulons pas faire comme lui. Houphouët Boigny , c’est le papa de tous. Et certains d’entre nous avaient conseillé à Nana Boigny N’Dri III de fermer le caveau. Mais, il a dit non. Il a donné des instructions, il a pris toutes les dispositions, pour que, et Bédié et Dahouet puissent aller au caveau. Dans l’espoir que peut-être l’esprit d’Houphouët Boigny va leur parler pour qu’ils retrouvent la raison. Nous ne pouvons pas nous opposer à l’accès au caveau. Même Gbagbo, s’il vient demain, on l’emmènera là-bas.
Qu’est ce que vous conseillez aux présidents Bédié et Ouattara qui sont en froid en ce moment ?
Je suis petit, moi Konan Kan de donner conseil à des gens aussi expérimentés et aussi sages. Je ne peux que prier Dieu l, et nos ancêtres de parler à tous les deux pour qu’ils s’entendent et qu’ils se parlent. Nana Boigny N’dri III s’est rendu avec la reine des baoulé, Nana Akoua Boni III, auprès du président Ouattara, dans une mission de médiation avec le conseil du royaume. Ils étaient sept (7) chefs de canton. Le président Ouattara les a bien reçus. Il leur a même dit d’aller parler à Bédié, et que lui est prêt à rencontrer Bédié si celui-ci le veut. Ils sont aussi allés avec la reine à Daoukro, ils ont parlé au président Bédié. Le président a répondu que lui aussi était d’accord sur le principe, qu’il appréciait la démarche. Mais, qu’il allait se retirer pour parler à sa famille biologique et politique. Cela fait trois mois. Les chefs canton attendent toujours qu’il rappelle. Nous notre souhait, est qu’ils s’entendent.
Que pensez-vous de l’acte du président Bédié, le mercredi 6 dernier, quand il a dénoué le pacte pris en 2010 entre le président Ouattara et lui ?
Ils étaient venus à deux en 2010. Maintenant, il vient seul .Ça veut tout dire. Je n’ai pas de commentaire à faire. Sinon, historiquement, c’est le Premier ministre Charles Konan Banny, qui avait trouvé le nom « Allah Gnissan » et qui l’avait suggéré au président Bédié. Maintenant qu’il le débaptise, c’est dommage. Imaginez que le président Ouattara appelle les gens pour dire qu’il va débaptiser le pont HKB .On n’agit pas sur le coup de la colère, de la rancœur. On souhait qu’il se calme. Qu’il retrouve toute sa raison. Pour nous les Akouè, le président Ouattara demeure « Allah Gnissan ». Quand tes parents te donnent ton nom, c’est pour la vie. On ne se lève pas un matin, pour t’enlever ça. Nous nous ne le suivons pas dans ça
Quelles sanctions réservez- vous aux autres chefs qui ont bravé l’autorité du chef canton Nana Boigny N’Dri III ?
Aucune. Vous savez notre chef est un homme de paix. Il ne prendra aucune mesure de rétorsion contre eux. Il prie Dieu qu’un jour Dieu le touche pour qu’il fasse leur retrouver la raison. Même, ses ennemis sont ses administrés. Notre chef ne pense pas à l’unanimité. On peut être contre lui, mais c’est lui le chef. Notre chef canton prône l’union et l’entente. Donc, ceux qui sont partis avec Dahouet , Nana Boigny N’dri n’a rien contre eux . Si demain, ils viennent voir le chef canton, il va les accueillir, il ne se fâchera pas contre eux. Toujours notre message est la paix, la réconciliation et l’entente entre les enfants d’Houphouët Boigny. Il n’y a pas d’autre.
Nana Boigny N’dri III est le chef canton des Akouè , cela a été confirmé plusieurs fois . Mais, qu’est ce qui explique encore cette présence de Dahouet Boigny Augustin comme chef canton Akouè à la rencontre du mercredi dernier ?
Très belle question. Souvenez- vous, il y a quelques temps, pendant que Gbagbo était président, il y a une certaine Akissi qui se faisait appeler reine de Sakassou. Comme son comportement ne plaisait pas aux chefs cantons, ceux-ci se sont réunis tous à Sakassou. Nana Boigny N’dri était empêché, c’est moi Konan Kan, qu’il a désigné d’aller le représenter à cette réunion des chefs canton Baoulé. Au cours de cette réunion nous avons pris deux décisions. Nous avons destitué Akissi et nous avons installé un conseil de régence, composé de trois personnes. Nana N’goran Koffi, Nana Toto Kra et Kouame Diby Robespierre, qui n’est pas Nana. Il est conseiller, mais il n’est pas Nana. Voilà les trois hommes qui constituaient le triumvirat. On leur a assigné deux missions : Gérer le royaume de Sakassou et deuxième mission, essayer de trouver une entente entre les différents héritiers de Sakassou qui se battaient pour le trône. Jusqu’à ce qu’ils trouvent la dernière reine qu’on vient d’introniser. Mais, on ne leur a jamais donné comme mission d’aller désigner le chef canton des Akouè. Donc, le fameux document, dont monsieur Dahouet se vante qu’il a de Sakassou , s’il devait être valable, il devait porter trois signature, pas une seule. Comme, je l’ai dit, il s’agit d’un triumvirat, c’est trois hommes qui prennent une décision. Si jamais Sakassou , vous reconnaît Dahouet , ça devait porter leur trois signatures . Or ça ne porte qu’une, celle de Kouamé Diby Robespierre. Lequel Kouamé Diby Robespierre dit qu’il n’a jamais signé ce document. Il vit toujours. Vous pouvez aller l’interroger. Donc, le document de Dahouet , c’est du faux . C’est un faux grossier. Et c’est avec ce faux là, qu’il a abusé de la confiance du président Bédié. Parce qu’il est allé même jusqu’à Daoukro , montrer l ça à Bédié pour dire que c’est Sakassou qui l’a nommé . Donc, de bonne foi, Bédié croit que c’est Sakassou qui l’a désigné. Mais Sakassou ne l’a jamais désigné. Et nous les chefs Akouè , nous avons porté plainte, auprès du tribunal de Toumodi pour faux usage de faux et usurpation de titre , d’identité . Ça sera au tribunal le 28 mars 2019 . Il a un avocat, nous avons un avocat. Et on va se trouver au tribunal de Toumodi. Il n’a pas le droit de s’habiller en chef, et venir se prévaloir d’un titre qu’il n’a pas. Et s’il était chef, les autres chefs Akouè seraient venus. Alors, le premier jour, il s’habille en blanc et le deuxième jour, il s’habille en rouge. Il ne connaît même pas la tradition. Le rouge et le noir, c’est la tenue de deuil. Le chef s’habille en rouge quand il est en deuil. Pas pour une fête. Donc, on peut être tenté de croire que, c’est ce que le président Bédié vient nous vendre. La Côte d’Ivoire du faux en écriture publique, la Côte d’Ivoire d’usurpation de titre, d’identité. Une précision, vous avez vu dans différents médias, que la reine des Baoulé se déplace avec Nana Boigny N’dri III. Donc, est ce que la reine est bizarre. Elle nomme Dahouet et quand elle s’en va faire des manifestations, c’est avec Nana Boigny N’dri. Il y a quelque chose qui ne va pas. Ça tend à montrer déjà que le document de Dahouet est faux. Dahouet est un faussaire. Normalement, ce monsieur doit aller en prison. Mais, par respect pour le président Konan Bédié et le nom Boigny qu’il porte, on ne l’arrête pas. Mais est ce qu’il en a conscience ? Parce qu’on le laisse faire, il prend la mansuétude pour la faiblesse. Mais, s’il respectait lui-même son nom, il ne ferait pas ce qu’il est en train de faire. Et c’est par rapport à ce nom que les autorités ne veulent pas l’arrêter. Les textes là-dessus sont précis, quelqu’un qui se prévaut d’un titre de chef, qui n’est pas par arrêté administratif, quant il s’habille en chef, et qu’il va dans une cérémonie, directement c’est la prison. Mais, c’est par respect pour la mémoire d’Houphouët Boigny on le laisse. Nous pensons que le président Bédié a été abusé par Dahouet. Monsieur Dahouet doit arrêter ses agissements qui ne font pas honneur à la chefferie, qui ne font pas honneur à la famille Boigny et qui ne font pas honneur à la Côte d’Ivoire. Nous ne nous reconnaissons pas dans ça. C’est très important que je porte cette précision. Nana Boigny N’dri III ne doit pas parler. Il est chef de canton, comme on le dit chez nous , le chef ne parle pas. C’est moi Konan Kan qui doit éclairer votre lanterne sur ce fait. Parce qu’il y a un accord entre le village de Kami et celui de N’gokro. Quand le chef de Kami meurt, c’est le chef de N’gokro qui assure l’intérim et vice versa. Donc, quand Yablé qui assurait l’intérim de Kouassi N’go est mort, c’est à moi qu’on a confié l’intérim. Et après toute les épreuves initiatiques et autres, le nouveau canton a été désigné à la personne du gouverneur Augustin Thiam, je suis allé lui remettre le pouvoir. Donc, c’est légitime que je parle au nom du chef canton des Akouè. Que Dahouet arrête son cinéma. Il n’est pas chef canton, ici à Yamoussoukro. Le président Bédié avec tout le respect que j’ai pour lui, dit qu’il est l’héritier d’Houphouët Boigny . Je crois que la première chose, que quelqu’un qui se réclame de l’héritage de quelqu’un doit faire, c’est de respecter la parole de la personne dont il hérite. Et tout le monde se souvient qu’en 1970, le président Félix Houphouët Boigny a fait une déclaration publique, qui est passée sur les antennes de la télévision ivoirienne, désignant les enfants de Thiam comme héritiers au plan de la coutume. Donc, lui Bédié s’il est vraiment l’héritier d’Houphouët Boigny, il doit faire appliquer cette parole là. À moins que Dahouet ait changé de nom, qu’il s’appelle Augustin Dahouet Thiam. Pour rappel, aux funérailles d’Houphouët Boigny, Gbagbo est arrivé avec trente minutes de retard, et son porte-parole, c’était Affi N’guessan et Amani N’guessan. Il y avait la photo d’Houphouët Boigny, il a refusé de s’incliner devant la photo d’Houphouët, il a refusé de saluer madame Houphouët Boigny. Il s’est assis en face de la famille, et il a passé son temps à croiser et décroiser ses jambes. Ce qui chez nous les akans était un signe d’impolitesse. Il nous a donné 10 .000F et une bouteille de djinn .J’estime que ce jour là, il a insulté la famille Boigny dans son ensemble. Il a humilié même le cadavre d’Houphouët Boigny. Et c’est à eux aujourd’hui, que le PDCI veut s’associer contre Ouattara. Houphouët Boigny yako !
Sources L’intelligent